Ce terme ne m’appartient pas, car c’est le titre d’un livre passionnant qui est paru en 2000 aux éditions Flammarion.
Dans son ouvrage, Bob Aubrey définit « L’entreprise de Soi » comme tel :
» C’est une conception de l’individu qui se fonde sur le constat que l’homme augmente sans cesse sa capacité à se connaître, à s’éduquer, à d’adapter aux contextes sociaux et à développer ses stratégies de vie. »
Pour aller plus loin, je dirais que de plus en plus d’individus ressentent le besoin de prendre leur carrière en main et se comportent comme des « entrepreneurs de leur vie », ce qui n’a rien à voir avec le fait que les personnes souhaitent créer leur entreprise, mais qu’ils comprennent qu’il est indispensable aujourd’hui d’être proactif et qu’on ne peut plus compter uniquement sur l’entreprise pour gérer sa carrière.
Parler de l’entreprise de soi c’est traduire l’idée que chacun peut avoir prise sur sa vie, la conduire, la gérer, la maîtriser, en fonction de ses désirs et de ses besoins. Et cela, en élaborant des stratégies adéquates.
Loin d’être une chance, limitée à certains privilégiés, du moins dans nos pays développés, c’est une prise de conscience générale, qui touche tous les secteurs d’activité et tous les statuts professionnels.
Et on peut dire que les êtres humains ont dû faire beaucoup de chemin pour en arriver là. Non seulement notre société fait émerger de plus en plus de ressources d’autonomie, mais la complexité croissante des choix qui s’offrent à nous, fait que même les individus qui sont dotés de peu de ressources d’autonomie se retrouvent confrontés à la nécessité d’être autonomes…
Qu’on soit un individu ou une entreprise classique, on est confrontée à un problème de positionnement, donc d’identité.
Et même si l’identité d’un être humain se construit, dans un premier temps, dans son sein familial, avec ses amis et avec les membres d’une association ou d’une communauté à laquelle il appartient. Il reste indéniable que son identité se valide de plus en plus sur son marché, où la valeur économique de son travail subit des changements rapides et imprévisibles.
Comme l’entreprise classique, l’entreprise de soi prend son sens dans l’échange, qui n’est pas essentiellement économique, mais largement social. Et elle reste incomplète s’il s’agit seulement de se définir une identité passive et intellectuelle.
Ce qui marque le terme d’entreprise, c’est bien la capacité d’un individu à passer du souhait à la stratégie. Cela, même si on ne maîtrise pas tous les tenants et les aboutissants de son environnement.
Une stratégie n’étant pas toujours pleinement rationnelle, totalement active, ni forcément consciente.
Adopter une stratégie, c’est savoir qu’atteindre un objectif donné passe par certaines étapes et comporte nécessairement des obstacles. C’est être conscient des risques et des incertitudes, et savoir qu’un choix de carrière ou de projet doit prendre en compte son entourage, surtout si on a une famille, ou si on souhaite en avoir une…
L’entreprise de soi ne doit pas se confondre avec la quête d’indépendance absolue : dans un travail collectif subsistent des rapports d’interdépendance et de subordination. C’est un mouvement qui met en place des expériences et des outils conduisant à faire évoluer les individus et leurs contextes de vie.
On peut même oser dire que c’est une éthique de développement tout au long de sa vie. Selon Bob Aubrey, l’entreprise de soi n’est pas :
- La loi de la jungle ou un individualisme forcené.
- Une tentative pour plaquer les concepts de l’entreprise sur la vie des individus.
- Une forme d’ultralibéralisme où seul le marché serait pris en compte.
- Un substitut à la religion ou à la dimension spirituelle.
- Un prétexte pour manipuler les salariés.
- La quête d’indépendance maximale ou la liberté absolue.
On peut dire que l’entreprise de soi est une nécessité aujourd’hui, parce que notre monde a beaucoup changé lors de ces dernières décennies. Que nous nous éloignons à toute vitesse du mode de vie de la société industrielle, pour aller vers une société fondée sur le développement humain ! Qu’il nous faut l’assumer, avec ses responsabilités et ses risques ! Nous avons une éthique à définir, dans laquelle le bien-vivre est devenu une entreprise où on est soi-même moteur et finalité.
La nouvelle génération ne connaîtra certainement pas la vie programmée et assistée du berceau à la tombe. Elle est exposée à un avenir incertain.
Chacun est aujourd’hui confronté au défi de créer pour orienter sa propre vie autour d’un axe central : être autonome et responsable, avec comme corollaire : l’éthique de ce qu’il va créer.
Définition des mots : Entreprise : » entre-prendre « , » prendre entre « . Rassembler des éléments existants pour en faire quelque chose de nouveau, mais aussi, articuler l’initiative individuelle avec la dimension sociale et collective. Ethique : Ensemble des règles de conduite propre à une société ou à un groupe.
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©PascaleBaumeister – Tous droits de reproduction réservés – Première publication en octobre 2009
Bon article. J’aime énormément votre blog.